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16/08/2013 à 18h11

Coptes d’Egypte : «On peut parler de pogroms»
Par Sophie Caillat

Eglises incendiées, commerces pillés : pour avoir soutenu le coup d’Etat, les Coptes sont la cible de certains islamistes. Ils ont le sentiment de ne pas être défendus.

Depuis que leur pape, Tawadros II d’Alexandrie, a affiché son soutien au général al-Sisi lors du renversement début juillet du Président islamiste Mohamed Morsi, les Frères musulmans les tiennent pour coresponsables du coup d’Etat.

Alors en ce « vendredi de la colère », la minorité chrétienne copte redoutait plus que jamais une « guerre de représailles », dixit Le Maspero Youth Union, un mouvement copte de la jeunesse.

Les tensions sont anciennes entre les islamistes et cette communauté, qui représente entre 5% et 10% de la population et affirme descendre directement des pharaons.

Mais elles ont pris une toute autre ampleur : selon l’ONG Initiative égyptienne pour les droits de la personne (EIPR), au moins 25 églises ont été incendiées depuis mercredi et des attaques ont visé de nombreuses écoles, maisons et échoppes coptes dans 10 des 27 provinces d’Egypte.

La collaboratrice de CNN, Sarah El Sirgany indiquait ce vendredi sur Twitter qu’elle avait demandé plusieurs fois au au ministre de l’Intérieur quel était le plan pour assurer leur sécurité. Pas de réponse précise.

Le général al-Sissi a promis de répondre vigoureusement. Mais la plupart des attaques ont lieux dans des villages isolés où les forces de l’ordre sont peu présentes.

« La communauté est terrorisée »

« Depuis un siècle et demi on n’a jamais vu ça, l’évolution des violences depuis la révolution est exponentielle », expose au téléphone Jean Maher, président de l’Organisation franco-égyptienne pour les droits de l’homme et porte-parole de plusieurs associations coptes à Paris.

« La communauté est terrorisée. On peut parler de pogroms dans certains endroits », estime Tewfik Aclimandos, chercheur associé à la chaire d’histoire contemporaine du monde arabe au Collège de France.

« Des villages entiers sont menacés, pas seulement des lieux de culte », témoigne Mania Doss, copte égyptienne, interviewée par France Info.

Mickaël Mina, qui gère le site depuis la France où vivent 50 000 Coptes, est en contact permanent avec la communauté installée en Egypte. Il explique pourquoi les Coptes sont aujourd’hui pris pour cible par les islamistes :

« Depuis toujours, les islamistes considèrent que les Coptes n’ont rien à faire en terre d’islam. Dans les sit-in installés par les Frères musulmans, il y avait des appels à la vengeance contre les Coptes qui seraient les traîtres de la révolution.

Mercredi, la mèche a été rallumée et ils n’attendaient que ça. Les Coptes ne sont pas armés, ils sont sans défense, c’est une proie facile. Les pro-Morsi se sont dit : puisqu’on est dans l’opposition, autant mettre à exécution notre projet de faire partir les Coptes. »

Selon France 24, « les chrétiens d’Egypte ont d’ores et déjà pris le chemin de l’exil. De longues files de véhicules s’allongent devant le terminal des départs de l’aéroport du Caire ».

Le nombre de chrétiens coptes qui ont fui leur pays depuis la révolution est déjà très élevé : ils étaient 100 000 fin 2011, selon l’ONG Egyptian Union for Human Rights, qui estimait que la communauté pouvait voir ses effectifs se réduire d’un tiers en dix ans.

Cible des militaires en 2011

Les Coptes, qui avaient obtenu dix députés à la fin de l’ère Moubarak, ont pourtant pris une part active dans la révolution de la place Tahrir qui aboutit au renversement du dictateur.

Mais depuis la fusillade de Nag Hamadi, ils ne se sentaient plus en sécurité. A la sortie de la messe de Noël, le 6 janvier 2010, un musulman a ouvert le feu, tuant six chrétiens.

A Alexandrie, le 1er janvier 2011, l’explosion d’une bombe devant une église avait fait 21 morts et 79 blessés.

Plusieurs mois après le départ de Moubarak, en octobre 2011, ils ont cette fois été écrasés par les chars du maréchal Tantaoui, faisant 23 morts et 174 blessés. La répression de la manifestation a donné lieu à un début d’organisation avec le Maspero Youth Union, du nom de la place où s’est déroulé le massacre.

Jean Maher croit encore possible une cohabitation entre les religions :

« Des musulmans libéraux se sont réveillés pour protéger les églises, le peuple peut être ensemble contre les Frères musulmans. »

Il y a un an, un très joli film racontait l’histoire fragile et singulière des Coptes d’Egypte, qui partagent avec leurs concitoyens musulmans la vénération de la vierge.

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